Le Baume Copahu – Brésil


Accueil par Kaapi Fragrâncias


Lors de mon séjour au Brésil, j’ai été chaleureusement accueilli chez Kaapi Fragrâncias, à Campinas au nord de Sao Paulo, par André Tabanez (directeur sustainability) et par le CEO de Kaapi, Eduardo Mattoso. Cette entreprise est spécialisée dans la fève Tonka et le Baume Copahu. Elle fait également de la création de parfums pour des marques brésiliennes et travaille aussi sur quelques autres matières premières, pour la parfumerie comme pour l’alimentaire. J’ai pu découvrir leur usine ainsi que leur laboratoire de création.

Nous avons échangé durant toute une journée et j’ai pu en apprendre énormément concernant le Copahu et la fève Tonka (Découvrir mon article sur la Fève Tonka du Brésil). En plus de ces 2 matières, ils travaillent également sur la baie rose et le bois de Rose, ainsi que la Brazil nut pour l’alimentaire.

Dans cet article, je partage toutes les informations que j’ai pu obtenir suite à ces échanges concernant le Copahu : l’origine des producteurs, sa récolte et son extraction ou encore ma description olfactive du Baume Copahu et de son huile essentielle.


A la fin de l’article *cliquer ici* je rentre en détail sur l’origine des producteurs de Copahu et de fève Tonka et sur leur histoire qui a commencé il y a 150 ans, lorsqu’ils ont été amenés par l’état brésilien en Amazonie enfin d’extraire au départ le caoutchouc.


Récolte du Baume Copahu


Suite aux échecs face au marché du caoutchouc, ces producteurs se sont reconvertis principalement dans la production du Copahu et à plus petite échelle de la fève Tonka.



Il faut comprendre que le Copahu n’est pas cultivé, il n’y a pas de plantations faites par l’homme. Ces arbres sont à l’état sauvage et se situent un peu partout éparpillés au cœur de l’Amazonie. Les producteurs vivent au bord des rivières, la navigation étant le seul moyen de déplacement au milieu de cette jungle impénétrable. Lorsqu’ils vont extraire le Baume Copahu des arbres, ce sont des expéditions de 10 à 30 jours. Ils font à chaque fois plusieurs jours de pirogue à la découverte de nouvelles terres et donc de nouveaux arbres à extraire, et restent ensuite 10 à 20 jours afin de récolter le Baume de chaque arbre dans la zone découverte. A chaque expédition, ils peuvent récupérer 100 à 150 kg de Baume Copahu.



La récolte peut se faire toute l’année, cela dépend des besoins du producteur. La saison des pluies est cependant bénéfique pour eux car les rivières montent et leur permettent d’aller encore plus loin et de découvrir de nouvelles terres et donc de nouveaux arbres.



L’extraction du Baume Copahu


Dans un arbre de Copaïba le Baume se situe à l’intérieur d’une cavité unique dans la partie inférieure du tronc, soit à 1m50 maximum de la base de l’arbre. Dans une cavité, on récupère généralement 5 à 10 kg de Baume copahu, allant jusqu’à 40 kg de rares fois, ou des quantités plus faibles (1-2 kg) si l’extraction a déjà été faite sur l’arbre, encore plus s’il y a peu de temps.

Aussi, l’arbre ne possède pas de baume dans sa cavité tant que son diamètre est inférieur à 30cm. Au-delà, plus l’arbre sera gros (et donc vieux) et plus il offrira une importante quantité de baume lors de sa 1ère extraction.



Après une récolte sur un arbre, il faut attendre 2-3 ans pour qu’il produise du baume en quantité correcte, suffisante pour être récoltée à nouveau. Entre 2 récoltes, il n’y a qu’une faible quantité de Copahu dans la cavité, il est donc plus intéressant d’attendre quelques années. Mais on n’aura jamais autant de quantité que lors de la 1ère récolte, car le baume s’est accumulé environ 15 ans dans sa cavité avant que le producteur ne découvre l’arbre.


Procédé d’extraction


La 1ère difficulté est de trouver la cavité sur l’arbre choisi, cette dernière n’étant jamais au même endroit. Le producteur essaye donc de taper sur le tronc et d’écouter pour l’identifier. Lorsqu’il a déterminé une zone, il va percer un trou de la taille d’une pièce de monnaie à l’aide d’un outil ressemblant à un gros tire-bouchon. Si le trou a bien été fait dans la cavité, il enfonce un bec creux et le Baume va directement sortir sous forme liquide. De nombreuses fois, il faut recommencer jusqu’à trouver la précieuse cavité, ce qui rend le travail compliqué.

Une fois l’extraction du Baume effectuée, le producteur met un bouchon sur le tuyau creux qui a été enfoncé dans l’arbre. Cela permet d’empêcher les maladies et les batteries d’entrer, mais aussi de faciliter la récolte suivante 3 ans plus tard, évitant ainsi de creuser à nouveau le tronc.


         


Les méthodes d’extraction ont évolué au fil des décennies :

• Il y a 60 ans, on coupait l’arbre entièrement ce qui impliquait une extraction unique pour chaque arbre.

• Puis les producteurs ont commencé à faire des trous dans les arbres pour les préserver et pouvoir les réutiliser pour d’autres récoltes. Mais ils laissaient le trou ouvert, provoquant de nombreuses maladies.

• Ensuite, ils ont décidé de refermer le trou après chaque extraction. Mais après 3 ans, l’arbre reprenait le dessus et il fallait à nouveau creuser, là où l’on avait rebouché.

• Enfin, la technique actuelle (et la plus optimale) est de mettre un bec creux, un court tuyau dans le trou puis c’est ce dernier que l’on vient simplement reboucher après chaque récolte.

Une fois tout le Baume extrait de la zone explorée, le producteur va ensuite le vendre directement, sans aucune intervention ou traitement sur le produit récolté.



Pour l’achat du Copahu, Kaapi Fragrâncias a 2 options :

• La plus simple : acheter dans les grosses villes situées dans l’Amazonie. Ici, les gros acheteurs ont racheté le Baume à d’autres acheteurs plus enfoncés dans l’Amazonie, qui eux-mêmes ont acheté à d’autres personnes encore plus au cœur de la forêt etc, jusqu’au producteur même, au bord de la rivière. Avec cette option, Kaapi n’aurait aucune traçabilité du produit, le Copahu venant de différents endroits, différents producteurs, différents acheteurs.

• La 2ème option est celle qu’ils choisissent pour la plus grande partie de leur stock : une réelle traçabilité du produit. Ils travaillent avec des ONG et ont plusieurs partenariats avec des coopératives qui sont en lien direct avec les producteurs. Dans ce cas de figure, c’est avantageux pour les producteurs qui sont mieux payés car pas d’intermédiaire, et également pour Kaapi qui a une bien meilleure traçabilité du Copahu, ce qui est de plus en plus demandé dans l’industrie.



Le prix du Baume Copahu payé directement au producteur est d’environ 15$/kg. Il sera ensuite vendu après le passage à l’usine de Kaapi à environ 50-80$/kg. A savoir également que la production totale de Copahu dans tout le Brésil est autour de 150-200 tonnes par an.


Description olfactive du Copahu


Suite à toutes ces explications sur le Copahu, André m’a fait sentir leurs produits : le Baume Copahu et l’huile essentielle de Copahu. En effet, ils proposent à leurs fournisseurs ces 2 produits, l’huile essentielle de Copahu étant une simple distillation à la vapeur d’eau du produit brut, le Baume.

• Baume Copahu : métalique, caryophyllene, humide, cave, frais eucalyptus, conifère terpénique, cuiré, animal++, effet styrax (sans le côté cinnamique), minéral, champignon, très légèrement fécal, effet olive verte.

–> Contient 35-40 % en Caryophyllene


• HE Copahu : +boisé, fumé, santalé, légèrement vert, minéral, effet silex, effet Sclarene, fruit frais.

–> Contient 45-55% en Caryophyllene

Le composant principal du Copahu est le Caryophyllene. Il est présent entre 10% et 60% en fonction de l’espèce de Copahu et de l’arbre. Un bon Baume Copahu a un taux de Caryophylene au-dessus de 40-45%.


Utilisation du Copahu


Au Brésil, le Copahu est connu pour ses bienfaits en médecine, notamment pour la cicatrisation des plaies. Mais cette utilisation par les locaux en médecine s’est vraiment perdue au fil des générations.


Auparavant, on le retrouvait également dans l’industrie de la peinture pour les vernis avant que son prix n’augmente lors de ses débuts d’utilisation en parfumerie, entre 1950 et 1960. C’est à ce moment-là que la grosse production de Copahu a réellement commencée, utilisée principalement en parfumerie jusqu’à encore aujourd’hui. Une partie sert aussi pour l’industrie des arômes.

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Histoire sur l’origine des producteurs de Copahu et fève Tonka


Pour mieux comprendre pourquoi ces personnes ont décidé de vivre au cœur de cette forêt immense, alors que ce ne sont pas des indigènes originaires de l’Amazonie, il faut remonter 150 ans en arrière.

Au début de la révolution industrielle et de l’industrie automobile, le caoutchouc devient une matière première extrêmement prisée et demandée par les États-Unis notamment pour la confection des pneus. Le Brésil possédant une quantité très importante dans l’Amazonie, l’état décide de prendre 500 000 hommes de la région pauvre et aride de Bahia, sans leur famille, et de les envoyer au cœur de la forêt amazonienne avec une promesse de paiement. De 1880 à 1910, le Brésil devient alors le plus gros exportateur mondial de caoutchouc, détenant 95% du marché. Les États-Unis et le reste du monde dépendaient donc totalement du Brésil et de l’Amazonie à cette époque-là pour l’industrie automobile.



En 1876, un Anglais est venu au Brésil récupérer des graines de l’arbre du caoutchouc, afin de les planter à Londres dès son retour puis d’envoyer les plants quelques années après directement en Malaisie, colonie anglaise. 15 ans après, les plantations étaient prêtes à être commercialisées. Le prix du caoutchouc a alors totalement chuté et les États-Unis se sont tournés vers la Malaisie, délaissant totalement le caoutchouc brésilien. En 1920, le Brésil ne détenait plus que 2% du marché mondial. Les hommes envoyés dans l’Amazonie 40 ans plus tôt ont donc été totalement abandonnés par l’état brésilien.

Durant la seconde guerre mondiale, suite à la difficulté d’approvisionnement, les États-Unis s’intéressent de nouveau au caoutchouc de l’Amazonie, et par conséquent l’état Brésilien envoie de nouveau 100 000 hommes au cœur de la forêt pour cultiver et récolter cette matière. Mais à la fin de la guerre, les États-Unis de désintéressent à nouveau du Brésil et ces centaines de milliers d’hommes sont une nouvelle fois abandonnés et vivent comme des indigènes.



Cela explique donc les raisons de la présence de ces hommes qui ne sont pas originaires de l’Amazonie et qui finalement vivent ici quasiment comme les indigènes amazoniens. Ce sont ces familles, après ce second échec du caoutchouc, qui se sont tournées vers le Baume Copahu et son extraction ainsi que la récolte de la fève Tonka.

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**Merci à André Tabanez et à Kaapi Fragrâncias pour m’avoir fourni la plupart des photos présentes dans cet article**

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